Maxime Champy est né en 1926 et a connu la guerre. Réfugié à
Limoges avec ses parents, il s'est engagé en 1944, l'année de ses 18
ans, dans les Forces Françaises de Libération, puis en 1947 a
commencé ses études de Médecine qu'il a poursuivies à Strasbourg à
partir de 1949. Nommé Interne en 1951, il a fait de l'ORL qu'il a
validée en 1959. En 1960 il s'installe en ville et garde son cabinet
d'ORL jusqu'en 1972. Parallèlement, persuadé que sa voie est ailleurs,
en maxillo-faciale, inexistante à Strasbourg, il fait son CES de
Stomatologie qu'il passe en 1961. En 1963, il réussit l'agrégation de
Stomatologie pour 9 ans et en 1972, il est « intégré de plein
droit » du fait de la loi Debré dans le CHU strasbourgeois. Il n'y a pas
encore de service et Maxime Champy trouve quelques lits et une salle
d'opéra(on occasionnelle dans un service de chirurgie d'urgence.
Les choses vont changer en 1974 : l'hôpital de Strasbourg a construit
dans le bâtiment historique, alors encore u(lisé pour les soins, un
Service autonome de Stomatologie et chirurgie Maxillo-faciale de 8
lits. Fin 1973 arrive de Nancy Jean-Pierre Loddé, chef de Clinique, et le premier Interne Titulaire dans le service ouvert depuis 1
mois (c'était moi !)! Vient alors une période exaltante de grande
créativité puisque tout était à faire : recruter des patients, réparer les
activités, prendre la garde de chirurgie maxillo-faciale 24 h sur 24 à une époque où les accidents de la route étaient de gros pourvoyeurs
de fractures faciales et où l'ostéosynthèse maxillo-faciale n'existait pas.
Le Professeur Maxime Champy détestait les blocages bimaxillaires,
qu'il considérait comme nuisibles. Il s'est immédiatement intéressé
aux plaques et vis : nous avons u)lisé dès 1974 les plaques de
vitallium pour chirurgie de la main, imitant ainsi Michelet, et aussi le
matériel mis au point par le Pr Péri avec Nichrominox. Mais le Pr
Champy avait d'autres ambi-ons : trouver le moyen d'avoir un
matériel standardisé et bien adapté à notre discipline. Car à l'époque
n'avait pignon sur rue que le matériel dérivé des os longs d'AO, de
grosses plaques d'ostéosynthèse avec compression créées par Luhr, et
les vis en compression de Niederdelmann.
Il a ainsi eu l'idée d'évaluer les contraintes subies par le matériel
d'ostéosynthèse dans la mandibule et s'est associé à de jeunes
chercheurs de l'ENSAIS de Strasbourg : ils ont réalisé la célèbre
expérience de la poutre encastrée. Ensuite il a fait appel à la structure
d'étude biomécanique nouvellement créée avec le Pr Yvan Kempf, le
GEBOAS, pour définir les qualités du matériel à utiliser. La
démonstration expérimentale de la stabilité de l'ostéosynthèse d'une
petite plaque placée le plus près possible du bord supérieur de la
poutre et la mesure des contraintes dans le montage lors de la mise
en charge a rapidement abouti à la fabrica1on d'une plaque très vite
appelée « miniplaque », à laquelle le nom de Champy est resté
définitivement attaché, et qui a fait le tour du monde.
Les études de Champy avec ses collaborateurs ont parallèlement
défini le cahier des charges du matériel : un alliage d'acier avec du
chrome et du molybdène pour le rendre plus malléable et l'adapter
aux os de la face a été utilisé avant l'arrivée beaucoup plus tardive du
titane, la référence universelle actuelle.
C'est KLS Martin, groupe allemand qui avec Mr de Zeeuw, chef de
produit génial, a repris les directives données par Maxime Champy et
a réellement lancé en 1979 la fabrication de la miniplaque : 0,8 à
1mm d'épaisseur, rigide mais malléable, avec des vis de 2mm de φ et
autotaraudeuses ; des plaques sans la célèbre compression chère aux
orthopédistes !
Bien sûr, ce fut une évolution fantastique pour toute la chirurgie
maxillo-faciale, et les principes développés par Champy entre 1974
et 1976 restent entièrement valables et sont encore le credo de tous
les matériels d'ostéosynthèse de la discipline. Même AO les a adoptés
en 1988. Mais il faut bien se rendre compte qu'à l'époque, s'il est vrai
que le développement de l'ostéosynthèse était dans l'air, les travaux et les conclusions de Champy ont été une révolution.
Maxime Champy a fait le tour du monde, invité par plus de 60 universités pour exposer ses principes de l'ostéosynthèse fonctionnellement stable qui a évolué vers « stable dynamique ». Il a
créé le SORG, Strasbourg Osteosynthesis Research Group en 1988 que vous connaissez. Il est resté chef du Service de Strasbourg jusqu'en
1992 et a pris sa retraite en 1995. Nous lui devons tous beaucoup,
mais moi en particulier, et c'est une grande satisfaction de pouvoir le
remercier et de le voir honoré par vous tous aujourd'hui !